Souvent l’envie d’être soi aussi
nous vient d’un autre. Pourquoi ai-je ce vouloir de me réconcilier avec notre
langue créole ? J’ai lu d’Alphonse Daudet, défendant la langue française, cette
pensée fort juste et édifiante qui dit que Quand un peuple tombe en
esclavage, tant qu’il tient sa langue, c’est comme s'il tenait la clef de sa prison *!
Notre sagesse populaire me dit
aussi : « Si dlo bon pou chouval, i pou bon pou milé », si l’eau
est bonne pour le cheval, elle l’est aussi sans doute pour le mulet.
Pour moi qui use si gauchement de
ma langue maternelle, quel meilleur plaidoyer pour la langue créole ? Nous peuples créolophones nous sommes tombés
en esclavage et l’interdit d’être nous-mêmes nous tient encore à l’encolure. Cette
belle langue créole est celle qui nous dit mieux, qui brasse et marie mieux les
ondes profondes de nos états d’âme. Alors, je cherche à donner ce que j'ai de mieux.
* Alphonse Daudet, Contes
du lundi », « La dernière classe ».